Après ces quelques jours aux Turks Caïcos dans la baie de Sapodilla, nous avons repris la mer, tout d’abord pour retraverser le lagon intérieur et se diriger de jour vers un mouillage en eaux plus profondes et plus sûres. Nous ne nous voulions pas naviguer dans ces profondeurs inférieures à 4m de nuit et au petit matin.
En jaune, notre route d’arrivée dans la baie, et en rouge la route de sortie à travers les cayes et les bancs de sable; la voile, génois seul, à chaque fois.
Nous passons la soirée dans une marina en travaux, abandonnée depuis au moins 15 ans et simplement surveillée par un pov’ gardien tout seul. Un mouillage original et de jolies photos,
… mais en conclusion pas très indiqué: moustiques en nombre en soirée et aucun éclairage pour nous assister lors de notre départ nocturne au petit matin, et comme par hasard, nuit sans lune.
Le réveil à 4h du matin fut atroce. Cathy à relever l’ancre et le pitaine à la barre attaqués par des centaines de moustiques voraces et insatiables. Impossible de faire quoi que ce soit pour les éviter et obligés de se concentrer au maximum pour retrouver dans la nuit noire la trace de sortie aux instruments. Un grand moment de solitude collective vécu aussi par Bruno une heure plus tôt….
Ce n’est qu’une demi-heure plus tard, sous l’effet conjugué du petit vent et de l’éloignement des côtes que les vampires ont enfin abandonné la partie.
Bruno, qui comme souvent s’est levé un peu plus tôt que nous pour prendre la mer, a pu profiter d’un lever de soleil exceptionnel.
Première étape, Great Inagua. Petite île qui fait partie de l’archipel des Bahamas, mais plus au sud que le groupe principal. Cela nous fait une belle étape, qui nous permet de couper en 2 le trajet de plus de 300 miles vers Cuba. A l’arrivée, Bruno qui nous a précédés nous avertit: “l’eau est claire…”; et effectivement, c’est exactement l’image que l’on peut avoir des Bahamas: du sable, des coraux, et de l’eau cristalline peu profonde. Aussitôt au mouillage, nous nous jetons à l’eau, avec la caméra pour ne rien manquer. A vous de juger……
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C’est pas compliqué: les photos, on dirait qu’elles ont été prises en plein air, avec des poissons aériens. Histoire d’améliorer l’ordinaire, le capitaine replonge aussitôt et sort le repas du soir en 5 minutes. Le poisson d’ici n’a pas l’habitude de voir des fusils…
Quand au coucher de soleil local, on vous laisse juges.
Nous pourrons donc ajouter les Bahamas à la liste de nos escales, même si notre arrêt sous drapeau jaune nous aura évité les formalités et si nos passeports n’auront donc pas été tamponnés au passage.
Le lendemain matin, départ dans la matinée, pour plus de 200 miles et la dernière grosse traversée de la saison. Cuba, nous voilà!!!…
La traversée débute à la voile, mais vers la fin de la nuit, le vent se calme de plus en plus et finit par nous imposer une marche au moteur. Mais la mer est tranquille, on a encore bien des réserves et Manoir avance correctement à 6 noeuds sans tirer sur les chevaux (moteur à 1500 tours en général).
Le lendemain en fin de journée, après avoir longé la côte Nord de Cuba toute la nuit, on décide de concert avec Bruno de s’arrêter à Puerto Padre, baie profonde et bien abritée. Dès notre approche, les militaires nous joignent à la VHF, nous demandent de nous identifier, nous autorisent à entrer dans la baie, puis insistent pour qu’on vienne mouiller juste devant leurs bureaux, pile à côté d’un terminal de chargement de cargos. Bof, bof pour l’ambiance et le paysage. Dommage car dans la mangrove, nous avions repéré de jolis mouillages.
Puis l’équipe locale monte à bord: médecin, vétérinaire, douanier, autorité du port. On répond aux questions, il remplissent des carnets manuscrits (pas de formulaires), ils demandent à inspecter (brièvement) le bateau, et tout se passe sans souci. Au final, une petite heure à leur consacrer, rien à payer (ils nous ont expliqué qu’ils n’étaient pas habilités à faire notre clearance), et on peut enfin savourer tous les 3 notre première bière à Cuba.
Le lendemain, on ressort de la baie par le même chenal, avec le courant de marée favorable (1,5 noeuds sortant, soit le même que la veille, qui était alors entrant).
Visiblement, les riverains sont aussi surpris que nous de voir 2 voiliers dans le secteur.
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Les jours suivants, nous naviguons tous les jours, en cabotant sur la côte Nord de mouillage en mouillage, toujours sans réaliser de formalités, toujours sous “yellow flag” (qui signifie, “j’invite les douanes à monter à bord”), avec des étapes plus ou moins longues selon la forme, l’envie ou la proximité d’abris.
Nos différents mouillages nous permettent d’inviter à bord notre première cubaine, (à noter que la cubaine, si elle a le même goût que les autres, se cache moins du chasseur. Faut-il en déduire qu’elle est un peu “facile”?…)
… ou aussi de découvrir des paysages ou des curiosités différentes chaque soir.
Le vent reste toujours aussi mou et nous impose beaucoup de navigations au moteur. Au total, ces étapes auront représenté 160 heures de navigation pour 90 de moteur. Autant vous dire que le dernier jour aux abords de la Havane on s’est appuyés sur le moindre souffle d’air pour arriver à la marina Hemingway. Nous avons remis 237 litres de gasoil pour une capacité annoncée de … 237 litres. Il était temps…
Nous avons eu la joie de revoir enfin des dauphins, qui sont venus à 2 reprises jouer avec l’étrave de Manoir. La pêche aussi a repris avec succès. Malheureusement, nous ne sortons que des barracudas, qui ne sont pas comestibles ici à cause de la ciguatera, et donc on les relâche. Mais voyez ce qu’on a sorti en 2 heures.
Et l’un d’eux a rencontré plus gros que lui et ne nous a même pas laissés le temps de le relâcher.
Et pour vous donner une idée de la clarté des eaux sur les côtes cubaines, voici une petite vidéo tournée en navigation (pétole totale, moteur, 12 m de fond à l arrivée vers Cayo Romano: eaux tellement claire qu’on inspecte le fond depuis le pont.)
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Dernière curiosité rencontrée en cours de route. Lors d’une soirée au mouillage de Cayo Fragoso, juste après le coucher du soleil, nous avons pu voir et photographier le fameux “rayon vert”. C’est un phénomène dont nous n’avons pas l’explication, qui est très rare et que peu de navigateurs ont eu la chance d’apercevoir. Peu après le coucher du soleil, un rayon vert sort de sous l’horizon et apparaît là où le soleil vient de se coucher. Il paraît que c’est souvent fugace, mais ce que nous avons vu a persisté quelques minutes; assez pour attraper nos portables et immortaliser la chose.
Le 7 juin, nous avons donc fait la dernière journée de navigation vers la marina Hemingway, proche de la Havane; ce qui nous a permis de découvrir les flottes de pêcheurs locaux et leurs embarcations précaires…munis de palmes d’un hameçon au bout d’un fil et d’un sac accroché sur la bouée pour contenir les poissons. Ils vont comme ça en mer, à 1 ou 2 miles des côtes. Z’ont pas peur, et il doit y avoir des pertes…💀☠️
Le “bateau”, c’est soit un bloc de polystyrène, soit une chambre à air de camion…
Et enfin, au bout du bout de cette longue étape, non sans essuyer un dernier grain qui rince Manoir à 5 miles de l’arrivée, nous découvrons enfin depuis la mer la capitale cubaine.
Au prochain épisode, vous découvrirez Cuba de l’intérieur.
🇨🇺