Quelques données sur le virus

On va parler d’un sujet un peu moins léger. Mais on ne va pas se mentir, même ici au Guatémala, notre vie est rythmée par les nouvelles sur cette saleté et nous vivons avec un couvre-feu et de sérieuses restrictions de déplacement. Sans oublier que consulter tous les jours des chiffres de personnes décédées et y chercher l’espoir n’est pas très réjouissant.

Le but de ce billet est d’essayer de partager avec vous quelques éléments factuels,et d’aider chacun à mieux appréhender la situation. En toute modestie et sans donner de leçon à quiconque.

Et tout d’abord, rappelons que je ne suis pas médecin et encore moins épidémiologiste. je ne sais pas comment on soigne ce truc. Je ne sais pas d’où il vient exactement ni comment il va peut-être évoluer. Je ne suis pas conspirationiste et je ne pense pas qu’on nous cache les « vrais chiffres ». Je pense que chacun à son niveau, citoyen, soignant ou gouvernant fait ce qu’il peut avec ce qu’il a.

Je pense en revanche que les données sur cette maladie sont pour beaucoup accessibles. Et plutôt que de fantasmer ou de paniquer, de diffuser ou relayer toutes les bêtises et arnaques qui fleurissent sur les réseaux sociaux, je pense que chacun peut se servir de sa tête, pour essayer de mieux mesurer ce qui se passe, quels sont les risques, et pour qui.

Quand à moi, mon seul travail dans cette affaire est juste de collecter les infos là où elles se trouvent, de les recouper pour tenter de les fiabiliser, et en les regroupant ensemble, d’en tirer des conséquences chiffrées (et non fantasmées ou intuitives) pour savoir « à quoi on a affaire ».

Mon éducation (merci papa et maman, et quelques professeurs) me conduit à ne pas croire tous les « ma soeur qui connait le médecin du député », et à rechercher dans les médias sérieux (on raye facebook, whatsapp et twitter) des chiffres proches de la réalité du terrain. Et mon seul talent est de savoir modéliser tout ça pour essayer de voir les conclusions. Alors soyons clairs, tous les chiffres sont entachés d’une marge d’erreur, tous les résultats sont «faux», car nul ne saurait prédire l’avenir, mais au moins on essaye de quantifier.

Tout ceci sans jamais perdre de vue que nous parlons de drames, de personnes décédées et de familles en deuil…

Les chiffres connus et non contestables, sont la population française, et sa décomposition en classes d’âge.

Le second paramètre est la distribution des décès par classe d’âge. Les statistiques cumulées de 4 pays (Allemagne, France, Italie, Espagne), soit sur 25000 décès au total donnent les chiffres suivants qui sont à la fois graves et très importants. Ces chiffres valent pour l’europe et son système de santé, même si celui-ci a été mis à rude épreuve.

Le premier chiffre important est la mortalité du virus. On sait avec certitude que de très nombreux cas sont asymptomatiques, et donc que 60 à 80% des personnes infectées ne le sauront pas avant un test général de la population. Ce qui explique les taux de mortalité si divergents dans les médias selon les pays. Mais quand on cherche les résultats des études qui ont été menées en testant systématiquement un groupe de population pour le comparer au nombre de décès (corée du sud, allemagne), on trouve des taux de l’ordre de 0,5% de mortalité. La dernière étude allemande trouve même 0.37%, mais on va pas se précipiter sur un chiffre trop optimiste. Cela reste une première hypothèse qui pourra être révisée.

  • 94% des décédés avaient plus de 60 ans
  • 5% avaient entre 50 et 60 ans
  • 1% des décédés avaient moins de 50 ans
  • Et pour le calcul, on peut dire que 0,1% avaient moins de 15 ans.

Enfin, dernière donnée d’hypothèse, l’immunité de groupe et la fin de l’épidémie sans vaccin nécessiteraient la contamination de 60% de la population, ce qui est énorme.

Avec ces 3 simples hypothèses, on peut tirer le tableau suivant:

Tout d’abord, gardons à l’esprit que c’est une simulation, un modèle mathématique ultra-simple, dans un cas improbable impliquant à la fois,le laissez-faire à la britannique et un système de santé qui garderait le taux de guérison actuel. la combinaison des 2 est impossible et espérons que nous n’en arriverons pas là. Mais que peut-on en déduire?

  • Cette maladie est fatale dans 1,17% de la population de plus de 60 ans. 182000 décès pour 15,5 million de personnes si on ne fait rien. C’est innaceptable, humainement, socialement.
  • Le taux de mortalité dans la population tombe à 2,3 pour mille entre 50 et 60 ans. C’est encore un risque fort, qui recouvre des réalités très diverses selon les pathologies présentes chez chaque personne (diabète, maladies vasculaires, obésité, etc…)
  • Ce taux plonge à 5,6 pour 100 000 chez les moins de 50 ans. En clair, 2000 décès, soit 50% de moins que sur les routes françaises (où ce sont les plus jeunes qui décèdent en majorité)

Tout ceci est à corriger des effets positifs ou négatifs propres à chaque personne, et qui restent sans doute pour certains à découvrir. Mais on peut en déduire 2 choses:

  • La sortie du confinement ne pourra pas se faire sans protection massive en direction des plus de 60 ans, et avec prudence pour ceux de plus de 50 ans, notamment avec des pathologies associées à risque.
  • Le risque en sortie de confinement pour les moins de 50 ans est comparable à celui des accidents de la route. Un risque qui ne fait plus peur à grand monde… pour rappel, 20 000 décès par an par accident domestique (bricolage, électrocution, chutes dans les escaliers, etc…), soit 10 fois plus. Il nécessite de la vigilance (comme sur la route ou dans la cuisine…), mais surtout pour retarder l’épidémie, ne pas charger les hopitaux, et protéger les plus faibles en attendant un vaccin ou une autre solution (sait-on jamais… )

Et même si les hypothèses sont à ajuster dans le futur, quand nous connaitrons mieux notre ennemi, les résultats chiffrés restent du même ordre de grandeur. Nos dirigeants sont parfaitement au courant de ces chiffres, n’en doutons pas, et leurs décisions dans les semaines à venir viseront à minorer cette catastrophe tout en permettant à l’économie de repartir.

Je n’oublie pas que ces chiffres recouvrent une réalité dramatique, que personne n’a envie de vivre. La mortalité fait partie de la vie; nous sommes en train de la redécouvrir. J’ignore la mortalité en voilier lors des traversées atlantiques, mais elle ne m’empêchera pas de reprendre la mer. Nous acceptons tous des risques, tous les jours. Celui-ci est nouveau, invisible, et donc il provoque des angoisses. c’est bien normal. J’espère que ce billet, à son niveau, vous aura permis de mieux asseoir votre perception de la situation.

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